Bogdan Dumitrescu : passages TV

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Antérieurement en 2022
 

Les siffleurs

Télévision : 21 mars 2022 à 22:40-00:15 sur Arte

film : thriller

Cristi, un inspecteur de police de Bucarest, a accepté des pots de vin donné par des trafiquants de drogue. Soupçonné par ses supérieurs, il est mis sur écoute. Il rencontre la sublime et mystérieuse Gilda. Avec elle et menacé par la mafia, il doit se rendre sur une île des Canaries où il apprend le Silbo, une langue sifflée ancestrale. En maitrisant ce dialecte, il sera capable de faire évader un mafieux de prison et récupérer les millions cachés par ce dernier. Mais Cristi va tomber fou amoureux de Gilda et rien ne se passera comme prévu... - Critique : Certains fans de la première heure du Roumain Corneliu Porumboiu risquent d’être surpris. Avec Les Siffleurs, sélectionné au dernier Festival de Cannes, l’auteur de Policier, adjectif change de style. Terminé les longs plans-séquences contemplatifs, les échanges dialectiques et érudits de dix minutes : place à un film noir rythmé (mais oui !), avec flic corrompu mais amoureux, femme fatale (la superbe Catrinel Marlon), mafieux à la gâchette facile, et même des scènes d’action — poursuites, bastons, fusillades, rien ne manque. Le recours à des dialogues strictement fonctionnels est, somme toute, logique : les personnages, obsédés par un butin à récupérer ou des gangsters à mettre hors d’état de nuire, n’ont pas de temps à perdre en débats sémantiques. On peut aussi y voir, de la part du réalisateur, la prise de conscience d’être arrivé aux limites d’un système esthétique très théorique qui, s’il a produit des pépites (Le Trésor, 2015), souffrait parfois d’un déficit d’incarnation — comme dans Métabolisme (ou quand le soir tombe sur Bucarest), en 2014. Mais cette évolution, si inattendue soit-elle, a du bon : Les Siffleurs se révèle un divertissement de haute volée, inventif et très plaisant, qui devrait permettre au plus caustique des cinéastes roumains de toucher un plus large public sans se renier. Car, malgré les apparences, la patte de Porumboiu est bien là. Dans l’humour décalé du scénario, tout d’abord. Pour échapper à la surveillance policière, les truands s’échangent leurs informations dans un langage sifflé traditionnel (et authentique !) inventé sur l’île de La Gomera, aux Canaries. L’apprentissage de cette technique de communication ancestrale, par l’inspecteur Cristi (Vlad Ivanov, qui jouait le commissaire retors de Policier, adjectif, une nouvelle fois excellent), produit des scènes très drôles. Tous les films de Corneliu Porumboiu, qu’ils relèvent de la fiction (depuis ses débuts avec 12h08 à l’est de Bucarest, en 2006) ou du documentaire (Match retour, Football infini), sont des réflexions sur la mise en scène. Les Siffleurs ne fait pas exception avec ses images de vidéo-surveillance qui transforment les policiers en voyeurs, sa séquence d’interpellation en flagrant délit (sur des plateaux de tournage désaffectés…) dont le « scénario » minutieusement préparé ne se déroule pas comme prévu — exactement comme les aléas de la météo obligent un réalisateur à modifier son plan de travail. Mais la mise en abyme du ­cinéma est, ici, franchement ludique. ­Porumboiu s’amuse avec les codes du film noir, qu’il cite ouvertement Gilda, pastiche la scène de la douche dans Psychose ou joue du contraste entre la violence des situations à l’écran et la douceur des arias d’opéra sur la bande-son. Dans ce contexte, l’utilisation à plusieurs reprises de La Barcarolle, le « tube » romantique des Contes d’Hoffmann, d’Offenbach, est irrésistible.

Année : 2019

Avec : Agusti Villaronga, Andrei Barbu, Andrei Ciopec, Andrew A, Anthony Martinez, Antonio Buíl, Bogdan Dumitrescu, Brien Libby, Catrinel Marlon, Cristóbal Pinto, David Agranov, Dorin C, Dorin Ceoarec, Ennaamane El, George Pistereanu, Ioan Coman, István Téglás, Julieta Szönyi, Kico Correa, Li Yi, Liviu Chitu, Matt Fowler, Peter Evens, Philip Hersh, Rodica Lazar, Sabin Tambrea, Sergiu Costache, Vlad Ivanov

Antérieurement en 2018
 

Ipu, condamné à vie

Télévision : 24 mai 2018 à 01:30-02:50 sur Arte

film

Roumanie, 1945. Dans un village de Transylvanie, Alex, 11 ans, aime jouer à la guerre avec son copain Théodore, alias Ipu, un soldat français laissé pour mort lors de la Première Guerre mondiale, que les habitants ont soigné. Simple d'esprit depuis sa blessure à la tête, Ipu est vu comme l'idiot du village. Un jour, Alex découvre le cadavre d'un combattant allemand qui lui a laissé essayer sa moto. L'homme a eu la gorge tranchée. Par peur des représailles, les villageois décident de pousser Ipu à se faire passer pour le coupable... Critique : | Genre : tragédie roumaine. Pour ceux qui se demandent ce que Gérard Depardieu fabrique dans les pays dont il vante les mérites, voici une partie de la réponse. Il incarne ici le rôle titre du film, Ipu (prononcer « Ipou » pour éviter tout malentendu à propos de l'hygiène corporelle de son personnage), ancien brigadier de l'armée française que les ­caprices du destin ont abandonné en Transylvanie. Ayant hérité d'une balle dans le crâne pendant la guerre de 14, Ipu fonctionne nettement au ralenti, partageant son temps entre travaux pour les notables locaux et la compagnie d'un enfant dont il est le complice de jeu. Il est l'idiot du village, et ni cette nouvelle guerre, ni l'occupation allemande ne semblent l'affecter. Jusqu'au jour où les nazis exigent qu'on leur livre le meurtrier d'un de leurs soldats, sans quoi ils exécuteront dix otages, en l'occurrence les fameux notables. Et, évidemment, tous les regards se tournent vers Ipu, qui ferait un coupable idéal. Ce film, produit et tourné en Roumanie, est, à plusieurs titres, un objet de curiosité. Sa distribution, en premier lieu, réunit, outre Depardieu, Harvey Keitel en roublard homme d'église et Laura Morante en bourgeoise égoïste et arrogante, tout ce joli monde parlant anglais sans que ça ne gêne personne. Son scénario et sa mise en scène ensuite, qui oscillent entre représentations affolantes de naïveté (les moments entre Depardieu et l'enfant enfoncent toutes les limites du ridicule) et scènes ambitieuses aux accents tchékhoviens. A ce titre, passé la pénible première demi-heure, le film bascule dans un huis clos tendu dans lequel l'idiot, roulé dans la farine par les notables qui lui promettent une place au paradis et la gratitude éternelle en échange de son sacrifice, retourne la situation et les confronte à la monstruosité de leur hypocrisie. — Bruno Icher

Année : 2013

Avec : Bogdan Dumitrescu, Gérard Depardieu, Harvey Keitel, Laura Morante, Bogdan Iancu, Alexandru Bindea, Nicodim Ungureanu, Gheorghe Visu, Hubert Damen, Joris Van den Hauwe, Titus Popovici, Anusavan Salamanian