Télévision : vendredi 29 novembre à 21:05-23:30 sur Chérie 25

film d'espionnage

Nathan Muir, un agent de la CIA, est sur le point de prendre une retraite bien méritée lorsqu'il apprend que Tom Bishop, son ancien partenaire, a été arrêté lors d'une mission où, sans l'aval de ses supérieurs, il comptait exfiltrer de Chine un détenu étranger. Accusé d'espionnage par les autorités, il est condamné à la peine de mort et doit être exécuté dans les 24 heures. Nathan se souvient que, quelques années auparavant, Tom et lui formaient un tandem efficace et soudé, travaillant aux quatre coins du monde et accomplissant des missions aussi périlleuses que passionnantes. Pourtant, la rencontre, à Beyrouth, de la séduisante Elizabeth Hadley semblait avoir détruit à tout jamais la complicité qui les unissait... - Critique : Depuis Top Gun ou Jours de tonnerre, on sait que Tony Scott ­ le frère de Ridley ­ se méfie comme de la peste des plans qui durent plus d'une nanoseconde. Accro au clip et à la pub, il dope ses films à l'image qui flashe, transformant souvent son récit en un kaléidoscope tonitruant et assommant. D'où vient alors qu'à la surprise générale Spy Game sorte à peu près intact du traitement « tony-scottien » ? D'où vient qu'il réussisse même à ressusciter un genre ­ le thriller d'espionnage ­ qu'on croyait définitivement obsolète ? Tout simplement de l'ampleur du récit et du charme des deux espions principaux, les plus sexy, sans doute, qu'ait connus la CIA. A ma gauche, Robert Redford, l'ancien-à-qui-on-ne-la-fait-pas, tout en expérience et en rouerie ; à ma droite, Brad Pitt, son alter ego juvénile, jeune-loup-impulsif-mais-prometteur. Le premier, excellent metteur en scène à ses heures, avait d'ailleurs dirigé le second (dans Et au milieu coule une rivière), suggérant déjà qu'il pouvait y avoir entre eux un lien de filiation. Spy Game en joue à plein, mais de façon implicite, un bon point pour Tony Scott. Quand commence le récit, le fils putatif a sérieusement déconné. L'opération qu'il a menée en solo dans une prison chinoise a tourné au désastre : arrêté par les autorités locales, il est condamné à mort, et la CIA est prête à le passer par pertes et profits ; sa vie ne vaut pas un incident diplomatique. Heureusement, le père adoptif veille : à vingt-quatre heures de la retraite, Redford va s'incruster dans la réunion de crise, et tenter de sauver la peau de Pitt, en retraçant ses états de service. Car c'est lui qui, après l'avoir lancé dans une opération en pleine guerre du Vietnam, l'a officiellement recruté pour l'« agence », alors qu'il était en poste à Berlin-Est, puis a supervisé ses missions suivan- tes, notamment l'exécution d'un chef de clan à Beyrouth... Cherchant à utiliser les réseaux de la CIA, au nez et à la barbe de ses supérieurs, Redford, mi-Shéhérazade, mi-Keyser Soze, gagne du temps et fait défiler vingt ans de politi- que extérieure américaine, de l'Extrême au Moyen-Orient, via le rideau de fer. Un digest d'autant plus plaisant que chaque séquence ménage sa dose d'action et d'émotion. Des micro suspenses, sacrément spectaculaires, inscrits au sein d'un suspense plus général : habile construction qui enrichit le récit, approfondit les personnages, et relance sans cesse l'intérêt. Qu'importe, alors, que Brad Pitt n'ait pas pris une ride pendant toutes ces années, tandis que Robert Redford s'est contenté de changer de coiffure et de lunettes (il en possède, visiblement, une belle collection), le plaisir l'emporte sur la vraisemblance. Il y a vingt-six ans, Redford jouait un espion débutant dans Les Trois Jours du condor, de Sidney Pollack ; Spy Game peut passer pour une version light de ce classique de l'espionnite paranoïaque. Mais une séquence cocasse atteste de l'ambition de Tony Scott (ou, surtout, de ses scénaristes) : un groupe de Chinois véreux monnaie ses services sans quitter des yeux un épisode d'Alerte à Malibu. Le message est clair : les États-Unis n'exportent plus de la démocratie mais des programmes télé. Comme tombeau du cinéma d'espionnage, pas de doute, Spy Game a de la gueule.

Année : 2001

De : Scott Tony

Avec : Brad Pitt, Bryggman Larry, Charlotte Rampling, Joerg Stadler, Marianne Jean-Baptiste, Matthew Marsh, McCormack Catherine, Michael Paul, Nabil Massad, Robert Redford, Stephen Dillane, Todd Boyce