Shawn Fitzgerald Ahern : passages TV

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Aujourd'hui
 

Emilia Pérez

Télévision : jeudi 13 mars à 08:12-10:20 sur Canal +

film : comédie musicale

Surqualifiée et surexploitée, Rita Moro Castro met ses talents d'avocate au service d'un gros cabinet plus enclin à blanchir des criminels qu'à servir la justice. L'opportunité de prouver sa valeur s'offre à elle lorsqu'elle est contactée par Manitas, un redoutable chef de cartel en fuite. Celui-ci lui demande de l'aider à se retirer du monde du narcotrafic et à réaliser un plan qu'il peaufine en secret depuis des années. Le baron de la drogue souhaite en effet devenir la femme qu'il a toujours rêvé d'être. Malgré ses craintes, Rita accepte cette mission risquée. Elle doit à la fois mettre en scène le "meurtre" de son client pour lui permettre de passer pour mort aux yeux de tous et organiser son opération de transition de genre... - Critique : Rentré du dernier Festival de Cannes auréolé du Prix du jury et d’un Prix d’interprétation collectif pour son quatuor d’actrices, Emilia Pérez pourrait à tout moment basculer du côté obscur de la farce. Du coup de force au coup de foudre, du ridicule au tragique, la ligne est ténue, et Jacques Audiard s’y perche comme sur un fil de rasoir. Pas spécialement mordu de comédie musicale, voilà que le funambule en signe une, en espagnol, doublée d’un film noir, triplée d’un mélo aux accents de telenovela… Il y a quelque chose de factice dans cette hybridation menée tambour battant, manière d’opéra précipité vers une issue forcément prévisible, puisque inévitable. D’aucuns le lui reprocheront, or c’est précisément ce qui fait son attrait. « De quoi parlons-nous aujourd’hui ? Nous parlons de violence », chante Rita (la Zoe Saldaña d’Avatar, dans une performance convaincante) au début de l’aventure. Avocate exploitée, l’ambitieuse écrit la plaidoirie que son patron récitera mot pour mot, au tribunal, afin d’obtenir l’acquittement d’un salopard coupable de féminicide. La scène se déroule entre un supermarché et une rue de Mexico recréés dans un studio parisien. Artificiel ? À 100 %, et assumé comme tel, revendiqué même, par la mise en scène, la vraie star, qui transforme les badauds en danseurs et, plus tard, des femmes de ménage en chœur antique à blouses roses ; utilise des fusils comme percussions sur la bande originale, puissante et diverse, composée par Camille et Clément Ducol ; suggère la Suisse en posant une berline noire sur un fond de brouillard neigeux ; ou plonge les convives d’un dîner londonien dans l’obscurité, pour en isoler deux à l’image et s’immiscer dans leur conversation secrète. Emilia a-t-elle tué le macho en elle ? Fabriqué aussi, le récit ne s’embarrasse pas plus de réalisme. À l’issue du procès susmentionné, Rita reçoit, en effet, une proposition qui ne se refuse pas. Manitas Delmonte, un narcotrafiquant possédant à la fois la gueule et le fric de l’emploi, l’engage pour organiser sa nouvelle vie : il va devenir la femme qu’il a toujours été dans le creux de son âme. « Mon seul désir, c’est elle », murmure le loup se rêvant brebis sur un air dont la douceur touche au cœur. Charge à Rita de localiser le chirurgien idoine (hommage, en passant, aux ballets kaléidoscopiques du chorégraphe hollywoodien Busby Berkeley), de transférer des montagnes de dollars sales et de dénicher un nid lausannois pour l’épouse (Selena Gomez) et la progéniture du criminel. Qui mourra pour de faux, aux yeux de ses proches et du monde, avant de renaître sous l’identité d’Emilia. Difficile de ne pas frémir, à ce stade, tant l’auteur d’Un prophète (2009) évoque davantage le cuir tanné que le queer inné. Il entre en terra incognita avec empathie, maladresse aussi (aïe, la grosse voix mâle qui revient avec la rage), surtout galvanisé par le potentiel romanesque d’un phénix contemporain. Sa chance s’appelle Karla Sofía Gascón. Passée du « il » au « elle » en 2018, à 46 ans, l’actrice espagnole fait de même à l’écran, semant un trouble précieux puisqu’elle joue à la fois Manitas, visage tatoué et ratiches en or, et la méconnaissable et solaire Emilia, reconvertie en tata gâteau pour ses rejetons orphelins et en amie pour sa veuve. Voire en héroïne médiatique, entre gala de bienfaisance, exhumations de fosses communes et appel à la réconciliation nationale. « De quoi parlons-nous aujourd’hui ? Nous parlons de violence », promettait donc Rita. C’est, plutôt que la transidentité, l’éternel sujet d’Audiard, qui a sondé souvent la brutalité des pères, leur tendresse verrouillée (De battre mon cœur s’est arrêté, De rouille et d’os…), sans oublier la fatalité guerrière qui les accable (Dheepan, Palme d’or 2015). En changeant de genre, Emilia a-t-elle tué le macho en elle ? Et l’ex-narco, renoncé à sa toute-puissance ? Le passé, toujours, réclame l’addition. En attendant, les humains se réinventent, et Audiard aussi. D’une morale vieille comme l’Évangile – qui a vécu par l’épée… –, il tire un drame dont l’émotion culmine dans les chansons.

Année : 2024

Avec : Adriana Paz, Damien Jalet, Edgar Ramirez, Eduardo Aladro, Emiliano Hasan, Gabriela Ceceña, Gaël Murguia-Fur, Ivanir Mark, Karla Sofía Gascón, Margot Théry, Selena Gomez, Shawn Fitzgerald Ahern, Zoë Saldaña

Lundi dernier
 

Emilia Pérez

Télévision : 10 mars à 15:09-17:19 sur Canal +

film : comédie musicale

Surqualifiée et surexploitée, Rita Moro Castro met ses talents d'avocate au service d'un gros cabinet plus enclin à blanchir des criminels qu'à servir la justice. L'opportunité de prouver sa valeur s'offre à elle lorsqu'elle est contactée par Manitas, un redoutable chef de cartel en fuite. Celui-ci lui demande de l'aider à se retirer du monde du narcotrafic et à réaliser un plan qu'il peaufine en secret depuis des années. Le baron de la drogue souhaite en effet devenir la femme qu'il a toujours rêvé d'être. Malgré ses craintes, Rita accepte cette mission risquée. Elle doit à la fois mettre en scène le "meurtre" de son client pour lui permettre de passer pour mort aux yeux de tous et organiser son opération de transition de genre... - Critique : Rentré du dernier Festival de Cannes auréolé du Prix du jury et d’un Prix d’interprétation collectif pour son quatuor d’actrices, Emilia Pérez pourrait à tout moment basculer du côté obscur de la farce. Du coup de force au coup de foudre, du ridicule au tragique, la ligne est ténue, et Jacques Audiard s’y perche comme sur un fil de rasoir. Pas spécialement mordu de comédie musicale, voilà que le funambule en signe une, en espagnol, doublée d’un film noir, triplée d’un mélo aux accents de telenovela… Il y a quelque chose de factice dans cette hybridation menée tambour battant, manière d’opéra précipité vers une issue forcément prévisible, puisque inévitable. D’aucuns le lui reprocheront, or c’est précisément ce qui fait son attrait. « De quoi parlons-nous aujourd’hui ? Nous parlons de violence », chante Rita (la Zoe Saldaña d’Avatar, dans une performance convaincante) au début de l’aventure. Avocate exploitée, l’ambitieuse écrit la plaidoirie que son patron récitera mot pour mot, au tribunal, afin d’obtenir l’acquittement d’un salopard coupable de féminicide. La scène se déroule entre un supermarché et une rue de Mexico recréés dans un studio parisien. Artificiel ? À 100 %, et assumé comme tel, revendiqué même, par la mise en scène, la vraie star, qui transforme les badauds en danseurs et, plus tard, des femmes de ménage en chœur antique à blouses roses ; utilise des fusils comme percussions sur la bande originale, puissante et diverse, composée par Camille et Clément Ducol ; suggère la Suisse en posant une berline noire sur un fond de brouillard neigeux ; ou plonge les convives d’un dîner londonien dans l’obscurité, pour en isoler deux à l’image et s’immiscer dans leur conversation secrète. Emilia a-t-elle tué le macho en elle ? Fabriqué aussi, le récit ne s’embarrasse pas plus de réalisme. À l’issue du procès susmentionné, Rita reçoit, en effet, une proposition qui ne se refuse pas. Manitas Delmonte, un narcotrafiquant possédant à la fois la gueule et le fric de l’emploi, l’engage pour organiser sa nouvelle vie : il va devenir la femme qu’il a toujours été dans le creux de son âme. « Mon seul désir, c’est elle », murmure le loup se rêvant brebis sur un air dont la douceur touche au cœur. Charge à Rita de localiser le chirurgien idoine (hommage, en passant, aux ballets kaléidoscopiques du chorégraphe hollywoodien Busby Berkeley), de transférer des montagnes de dollars sales et de dénicher un nid lausannois pour l’épouse (Selena Gomez) et la progéniture du criminel. Qui mourra pour de faux, aux yeux de ses proches et du monde, avant de renaître sous l’identité d’Emilia. Difficile de ne pas frémir, à ce stade, tant l’auteur d’Un prophète (2009) évoque davantage le cuir tanné que le queer inné. Il entre en terra incognita avec empathie, maladresse aussi (aïe, la grosse voix mâle qui revient avec la rage), surtout galvanisé par le potentiel romanesque d’un phénix contemporain. Sa chance s’appelle Karla Sofía Gascón. Passée du « il » au « elle » en 2018, à 46 ans, l’actrice espagnole fait de même à l’écran, semant un trouble précieux puisqu’elle joue à la fois Manitas, visage tatoué et ratiches en or, et la méconnaissable et solaire Emilia, reconvertie en tata gâteau pour ses rejetons orphelins et en amie pour sa veuve. Voire en héroïne médiatique, entre gala de bienfaisance, exhumations de fosses communes et appel à la réconciliation nationale. « De quoi parlons-nous aujourd’hui ? Nous parlons de violence », promettait donc Rita. C’est, plutôt que la transidentité, l’éternel sujet d’Audiard, qui a sondé souvent la brutalité des pères, leur tendresse verrouillée (De battre mon cœur s’est arrêté, De rouille et d’os…), sans oublier la fatalité guerrière qui les accable (Dheepan, Palme d’or 2015). En changeant de genre, Emilia a-t-elle tué le macho en elle ? Et l’ex-narco, renoncé à sa toute-puissance ? Le passé, toujours, réclame l’addition. En attendant, les humains se réinventent, et Audiard aussi. D’une morale vieille comme l’Évangile – qui a vécu par l’épée… –, il tire un drame dont l’émotion culmine dans les chansons.

Année : 2024

Avec : Adriana Paz, Damien Jalet, Edgar Ramirez, Eduardo Aladro, Emiliano Hasan, Gabriela Ceceña, Gaël Murguia-Fur, Ivanir Mark, Karla Sofía Gascón, Margot Théry, Selena Gomez, Shawn Fitzgerald Ahern, Zoë Saldaña

Lundi dernier
 

Emilia Pérez

Télévision : 10 mars à 15:08-17:17 sur Canal +

film : comédie musicale

Surqualifiée et surexploitée, Rita Moro Castro met ses talents d'avocate au service d'un gros cabinet plus enclin à blanchir des criminels qu'à servir la justice. L'opportunité de prouver sa valeur s'offre à elle lorsqu'elle est contactée par Manitas, un redoutable chef de cartel en fuite. Celui-ci lui demande de l'aider à se retirer du monde du narcotrafic et à réaliser un plan qu'il peaufine en secret depuis des années. Le baron de la drogue souhaite en effet devenir la femme qu'il a toujours rêvé d'être. Malgré ses craintes, Rita accepte cette mission risquée. Elle doit à la fois mettre en scène le "meurtre" de son client pour lui permettre de passer pour mort aux yeux de tous et organiser son opération de transition de genre... - Critique : Rentré du dernier Festival de Cannes auréolé du Prix du jury et d’un Prix d’interprétation collectif pour son quatuor d’actrices, Emilia Pérez pourrait à tout moment basculer du côté obscur de la farce. Du coup de force au coup de foudre, du ridicule au tragique, la ligne est ténue, et Jacques Audiard s’y perche comme sur un fil de rasoir. Pas spécialement mordu de comédie musicale, voilà que le funambule en signe une, en espagnol, doublée d’un film noir, triplée d’un mélo aux accents de telenovela… Il y a quelque chose de factice dans cette hybridation menée tambour battant, manière d’opéra précipité vers une issue forcément prévisible, puisque inévitable. D’aucuns le lui reprocheront, or c’est précisément ce qui fait son attrait. « De quoi parlons-nous aujourd’hui ? Nous parlons de violence », chante Rita (la Zoe Saldaña d’Avatar, dans une performance convaincante) au début de l’aventure. Avocate exploitée, l’ambitieuse écrit la plaidoirie que son patron récitera mot pour mot, au tribunal, afin d’obtenir l’acquittement d’un salopard coupable de féminicide. La scène se déroule entre un supermarché et une rue de Mexico recréés dans un studio parisien. Artificiel ? À 100 %, et assumé comme tel, revendiqué même, par la mise en scène, la vraie star, qui transforme les badauds en danseurs et, plus tard, des femmes de ménage en chœur antique à blouses roses ; utilise des fusils comme percussions sur la bande originale, puissante et diverse, composée par Camille et Clément Ducol ; suggère la Suisse en posant une berline noire sur un fond de brouillard neigeux ; ou plonge les convives d’un dîner londonien dans l’obscurité, pour en isoler deux à l’image et s’immiscer dans leur conversation secrète. Emilia a-t-elle tué le macho en elle ? Fabriqué aussi, le récit ne s’embarrasse pas plus de réalisme. À l’issue du procès susmentionné, Rita reçoit, en effet, une proposition qui ne se refuse pas. Manitas Delmonte, un narcotrafiquant possédant à la fois la gueule et le fric de l’emploi, l’engage pour organiser sa nouvelle vie : il va devenir la femme qu’il a toujours été dans le creux de son âme. « Mon seul désir, c’est elle », murmure le loup se rêvant brebis sur un air dont la douceur touche au cœur. Charge à Rita de localiser le chirurgien idoine (hommage, en passant, aux ballets kaléidoscopiques du chorégraphe hollywoodien Busby Berkeley), de transférer des montagnes de dollars sales et de dénicher un nid lausannois pour l’épouse (Selena Gomez) et la progéniture du criminel. Qui mourra pour de faux, aux yeux de ses proches et du monde, avant de renaître sous l’identité d’Emilia. Difficile de ne pas frémir, à ce stade, tant l’auteur d’Un prophète (2009) évoque davantage le cuir tanné que le queer inné. Il entre en terra incognita avec empathie, maladresse aussi (aïe, la grosse voix mâle qui revient avec la rage), surtout galvanisé par le potentiel romanesque d’un phénix contemporain. Sa chance s’appelle Karla Sofía Gascón. Passée du « il » au « elle » en 2018, à 46 ans, l’actrice espagnole fait de même à l’écran, semant un trouble précieux puisqu’elle joue à la fois Manitas, visage tatoué et ratiches en or, et la méconnaissable et solaire Emilia, reconvertie en tata gâteau pour ses rejetons orphelins et en amie pour sa veuve. Voire en héroïne médiatique, entre gala de bienfaisance, exhumations de fosses communes et appel à la réconciliation nationale. « De quoi parlons-nous aujourd’hui ? Nous parlons de violence », promettait donc Rita. C’est, plutôt que la transidentité, l’éternel sujet d’Audiard, qui a sondé souvent la brutalité des pères, leur tendresse verrouillée (De battre mon cœur s’est arrêté, De rouille et d’os…), sans oublier la fatalité guerrière qui les accable (Dheepan, Palme d’or 2015). En changeant de genre, Emilia a-t-elle tué le macho en elle ? Et l’ex-narco, renoncé à sa toute-puissance ? Le passé, toujours, réclame l’addition. En attendant, les humains se réinventent, et Audiard aussi. D’une morale vieille comme l’Évangile – qui a vécu par l’épée… –, il tire un drame dont l’émotion culmine dans les chansons.

Année : 2024

Avec : Adriana Paz, Damien Jalet, Edgar Ramirez, Eduardo Aladro, Emiliano Hasan, Gabriela Ceceña, Gaël Murguia-Fur, Ivanir Mark, Karla Sofía Gascón, Margot Théry, Selena Gomez, Shawn Fitzgerald Ahern, Zoë Saldaña