Télévision : 14 octobre à 22:55-01:05 sur Arte

film : drame

A Paris, à la fin du XIXe siècle. Claude Roc, jeune bourgeois couvé par sa mère, aime l'art et la littérature. Il fait la connaissance d'Anne Brown, une étudiante britannique qui devient rapidement son amie. La jeune fille l'invite à passer quelques jours au Pays de Galles, chez ses parents. Elle se réjouit de lui présenter Muriel, sa soeur chérie. Entre les deux jeunes femmes, Claude goûte les charmes d'un séjour enchanteur. Séduit par l'humeur sombre de la mystique Muriel, il lui propose le mariage. Sa mère exige un an de mise à l'épreuve. Claude met cette année à profit pour oublier Muriel tandis que celle-ci, d'abord indifférente, s'éprend graduellement du "continent", surnom que les deux soeurs ont donné à Claude... - Critique : Envoyé en Angleterre chez une veuve au visage d'ange, Claude sympathise avec ses deux filles. Ann est vive, décidée, Muriel, prude et déchirée. Elles surnomment Claude le « Continent ». Entre les deux, le cœur du jeune Français balance. « Amour, amour, les chiens sont lâchés... » L’écriture en spirale de Truffaut couvre les pages du livre d’Henri-Pierre Roché, dans un générique plein de haut-le-cœur. De sa propre voix, le cinéaste jette les mots de l’écrivain sur ses images terreuses et statiques. Meurtris par la violence d’un amour impossible, les personnages ne vivent pas à l’écran : ils se souviennent, en retenant leur souffle, et se cachent derrière le langage pour ne pas avoir à revivre leurs tourments. D’où vient pourtant cette sensation aiguë de partager physiquement la douleur du trio ? Du choc de la musique orageuse de Georges Delerue avec les images volontairement distantes de Néstor Almendros. Et surtout des signes visuels très oniriques que Truffaut nous oblige à décrypter. Ici, le puritanisme est sans cesse détourné par de tactiles jeux enfantins ou des conversations d'une crudité innocente. Et chacun porte en lui une blessure originelle aux manifestations médicales trompeuses : la foulure de Claude n'est qu’une crainte d’impuissance, et l'ophtalmie de Muriel n'est qu'un rideau tiré sur une dévastation intérieure. Avec son particularisme grave, ce drame bouleversant est sans ­doute le film où Truffaut se révèle le plus.

Année : 1971

Avec : Annie Miller, David Markham, Georges Delerue, Jean-Pierre Léaud, Kika Markham, Marie Mansart, Mark Peterson, Philippe Léotard, Stacey Tendeter, Sylvia Marriott, Tunc Irène